Repenser l’attractivité wallonne
Écrit par Mathilde Guillaume
17.07.2025
Auditionné concernant l’attractivité de la Wallonie lors de la Commission de l’économie, de l’emploi et de la formation du Parlement wallon du mardi 8 juillet dernier, Jean-Christophe Dehalu, Directeur du Service d’études d’AKT for Wallonia, a exposé le contexte et les enjeux de la compétitivité wallonne.
Aux côtés de Pascale Delcomminette, Administratrice générale de Awex et de Marie-Laure Moreau du cabinet d’audit financier et de conseil EY, il a rappelé l’importance de repositionner la Wallonie sur le plan international, et surtout des investisseurs étrangers. « Renforcer la compétitivité et l’attractivité de la Wallonie, c’est permettre à notre société de reprendre son avenir en main. C’est un des messages fondamentaux du rapport Draghi ».
Un contexte mondial instable
Dès son introduction, Jean-Christophe Dehalu a rappelé le contexte global dans lequel évolue la Wallonie en se basant notamment sur le rapport Draghi. Celui-ci pointe plusieurs d’éléments clés de la politique internationale : ralentissement du commerce international, instabilité géopolitique, hausse des prix de l’énergie et retard technologique de l’Union européenne. À cela s’ajoutent les crises successives, qui ont instauré un climat économique volatil et incertain.
Dans ce contexte fluctuant, la Wallonie se situe assez bas dans la production de valeur ajoutée par rapport au reste de l’UE : son PIB par habitant ne représente que 86 % de la moyenne européenne. « On n’a pas assez d’entreprises privées, et celles que l’on a sont trop petites. Une entreprise privée en Wallonie, c’est en moyenne 9,3 ETP. » La Région doit donc renforcer sa base privée productive via la création d’activités privées locales, la croissance des entreprises existantes et la création d’activités économiques via des investissements étrangers.
Une attractivité sous pression
Peu de projets d’investissements étrangers se sont développés en Wallonie ces dernières années et la dynamique des projets installés est en recul. Lorsqu’un investisseur étranger examine une implantation, il ne regarde pas que les incitants financiers. Il s’intéresse aussi à une série de facteurs systémiques : la disponibilité de terrains et la qualité des infrastructures liées, la stabilité politique du pays, la complexité administrative des démarches à entreprendre… Et surtout, la disponibilité d’une main-d’œuvre qualifiée : « On reste, en Wallonie, à l’heure actuelle, avec un besoin de fluidification du marché du travail. On a des pénuries de profils techniques qui se confrontent à un taux de chômage relativement élevé. L’enseignement qualifiant et universitaire ne forme pas assez de diplômés dans les STEM (Sciences, Technologies, Ingénierie et Mathématiques) et dans les métiers techniques. »
Des initiatives telles que le lancement du Forum industrie wallon, le plan MAKE 2030 au fédéral ou encore la signature d’accords commerciaux envoient des signaux positifs vers l’investisseur étranger, indiquant ainsi qu’elle est ouverte au commerce extérieur et aux investissements internationaux. En conclusion, pour gagner en attractivité à l’international, « la Wallonie doit être mise sur le radar des investisseurs étrangers et (…) un policy-mix adéquat, cohérent, lisible et compétitif est la base d’un argumentaire commercial pour attirer les investisseurs étrangers. »
Un check d’attractivité
Afin d’évaluer de façon régulière l’attractivité wallonne, AKT plaide depuis longtemps pour la mise en place d’un check d’attractivité structurel, baromètre qui permettrait de positionner l’évolution de l’attractivité de la Wallonie en termes de résultats.
Parmi les points d’évaluation à inclure dans ce check d’attractivité : mesures d’accompagnement des investisseurs étrangers, disponibilité des terrains, qualité des infrastructures, procédures de permis, priorités régionales à respecter, évolution du marché du travail et du coût de l’énergie, cadre fiscal, ratification d’accords commerciaux…
Des défis à relever
Lors de l’échange de vues final, AKT a soulevé à nouveau certains points problématiques et des solutions envisageables : l’accélération des délais de procédure pour les permis, la disponibilité des terrains via notamment la réhabilitation des friches, le travail sur la compétitivité fiscale… Sans donner de préférence à un secteur ou à un autre, le développement du secteur industriel manufacturier est à garder en tête car il est actuellement porteur pour la création d’emplois dans la Région. Tout en soulignant que « de façon générale, de nombreuses réformes, actuellement en cours, de conception ou d’implémentation, vont dans le bon sens, de notre point de vue, et il conviendra de les faire aboutir le plus vite possible. Singulièrement en matière d’enseignement et d’accompagnement des chercheurs d’emploi. »
Suite à tous ces constats, est-ce que la Wallonie peut devenir une terre d’accueil attractive et compétitive pour les investisseurs étrangers ? Jean-Christophe Dehalu de répondre : « Si nous sommes là aujourd’hui, c’est que l’on y croit et que nous avons toutes les raisons de penser que, avec les bonnes politiques et les bonnes indications, notre Région pourra, à terme, retrouver le podium des régions leaders au niveau mondial en termes d’attractivité et de prospérité. »